En quittant La Paz, nous nous dirigeons vers Cochabamba. Nous y retrouverons la famille Rejou. On saisit la moindre occasion pour se voir et passer du temps ensemble mais cette fois sera la dernière avant le départ.
La route est longue mais on a de la chance car elle est asphaltée ce qui n'est pas le cas partout en Bolivie. Nous sommes toujours sur l'Altiplano. C'est la saison de la récolte de la quinoa et les paysans travaillent partout. Cette plante ne pousse qu'à cette altitude, sur ce sol ingrat, avec des températures de folie et un vent capricieux. C'est d'ailleurs la seule chose qui pousse sur ce sol! Notre premier bivouac entre Oruro et Cochabamba, au milieu des champs de quinoa est incroyable. Croyez moi, on ne s'habituera jamais à de tels panoramas. Au moment du coucher du soleil, les couleurs sont phénoménales mais on se réfugie dans la voiture car, rapidement, il fait proche de zéro degré.
Pour arriver à Cochabamba, nous redescendons et les températures augmentent radicalement. Nous nous promenons en ville autour de la place 14 septembre. Cet endroit est vraiment agréable: des familles, des couples, jeunes et moins jeunes s'installent ici pour profiter de l'ombre. Une multitude de pigeons picorent les graines vendues par des mamitas aux enfants. Les filles s'en donnent à coeur joie et les oiseaux picorent dans leurs mains. Des tables avec des tracts, des panneaux d'affichages sont installés; des groupes dans lesquels nous observons de vives discussions se mêlent à ce décor. Ce lieu nous plait et nous y passons du temps.
Le lendemain, nous nous dirigeons vers le marché « La cancha ». Malheureusement, il est immense et en véhicule, c'est une horreur. Nous ne trouvons pas de stationnement et nous tournons pendant une heure avant de trouver un parking gardé. Malgré tout, ce marché est mémorable. On y trouve de tout: des chinoiseries, des fruits, des légumes; de la viande, du poisson, des restaurants, des vêtements, des plantes médicinales, des chaussures, de l'électronique, des lunettes de soleil, des vendeuses de jus de fruit, du pain frais, du fromage et je ne sais quoi encore. Nous n'achetons rien mais profitons des bruits, des odeurs, des couleurs. Yan et Lise se font coupés les cheveux pour 80 centimes d'euros. Nous trouvons même une boutique avec des jouets miniatures d'occasion: nous devinons des figurines de Star Wars et d'autres petits trésors mais malheureusement, le vendeur n'est pas là même si sa boutique est ouverte!
Nous avons retrouvé les Rejou et dénichons un bivouac à la sortie de la ville. Les enfants passent une soirée ensemble à jouer tranquillement pendant que les parents refont le monde et parlent beaucoup du retour imminent... Nous rêvons sous les étoiles tous les quatre jusque tard. Malgré nous, le retour occupe tout nos esprits. Nous sommes heureux de retrouver nos proches mais nous sommes également conscients de tourner le dos à une vie de rêve. Nous imaginons alors nos prochains véhicules pour les voyages à venir. Lequel? Quand? Où? Comment? Nous nous couchons ce soir là tous les 4 avec des étoiles plein les yeux... Malheureusement, le lendemain, nous nous quittons en sachant que la fin approche. Nous sommes un peu remués.
Nous prenons la direction de Sucre vers le sud par la piste. Marc et Marie, nos amis du bateau, nous y attendent. On a hâte de les voir. La route est mauvaise et fatigante. Pour couronner le tout, Yan est malade: c'est moi qui conduit. Et puis, nous ne prenons pas le temps de profiter: nous roulons pour arriver à une destination précise. Les paysages sont toujours beaux mais nous sommes fatigués et nous avons surtout hâte d'arriver. Malheureusement, à notre arrivée, l'hôtel camping où nous pensions séjourner est complet. Finalement, nous demandons l'autorisation de nous installer devant le complexe sportif de La Fancesa, à l'entrée de la ville. Je discute avec le gardien pendant que Yan, malade au possible, se couche directement. Le lendemain, l'hôtel Pachamama nous offre la possibilité d'entrer avec le véhicule et de profiter de toutes les commodités tout en dormant dans la voiture. Nous retrouvons Marc et Marie et passons trois jours avec eux à découvrir la ville et à partager les joies et galères du voyage; de bons petits repas; des fous rire.
Sucre est une ville magnifique. Elle est abusivement appelée la ville blanche mais à part son centre historique, très bien entretenu et repeint, le reste de la ville est assez commun. Néanmoins, le centre historique est vraiment magnifique. Nous nous y baladons en long, en large et en travers. Nous visitons également le « museo de arte indigena » où nous découvrons de magnifiques tissages locaux: les Tarabuco et les Jalq'a . Les travaux sont de toutes beautés et nous pouvons même observer deux tisseuses sur leur métier. J'essaie de prendre des contacts pour une intervention dans une école mais cela ne marche pas.
Nous découvrons le marché à quelques pas de l'hôtel et y revenons souvent. Je suis toujours aussi heureuse de me balader parmi les produits frais. Et quand les lieux ont un âme, c'est magique. Ce marché a ses multiples places spécialisées et nous nous y repérons rapidement au bout du deuxième jour. Il y en a une où les mamitas vendent leurs dizaines de variétés de patates dans de grands sacs alignés. Autour, des vendeuses de jus de fruits frais sont installées. C'est un régal de s'asseoir sur les grands tabourets pour savourer un jus de fruit délicieux tout en observant l'activité des vendeuses et des enfants jouant aux billes dans le brouhaha du marché.
Nous passons une dernière nuit avec Marc et Marie et nous couchons tard avant de partir pour Potosi. Nous sommes surpris par la route: elle est en bon état et nous arrivons en peu de temps.
Cette ville est une référence négative dans nos esprits: lieu emblématique de l'exploitation des indiens par les espagnols, des millions de personnes sont mortes ici. De nombreuses voies de circulation partaient d'ici pour se diriger vers le Pérou, l'Argentine et le Chili. Potosi était le centre névralgique de toute l'Amérique du Sud. Elle était même la ville la plus riche du monde à une époque brève mais fastueuse. Aujourd'hui, elle a perdu toute sa magnificence mais on ne peut qu'être impressionnés par le Cerro Rico dominant la ville. Cette montagne abrite la mine d'argent. Beaucoup de légendes lui sont associés. Chaque bolivien de Potosi ne peut s'empêcher de nous raconter l'anecdote de l'autoroute en argent qui aurait pu être construite entre Potosi et Madrid avec ce qui a été extrait de la mine. Certains économistes affirment même que le capitalisme en Europe serait né de l'afflux considérable de cet argent en Espagne. Aujourd'hui encore, la mine est exploitée dans des conditions difficiles et de nombreuses personnes meurent régulièrement.
Après en avoir longuement discuté, nous ne visiterons pas la mine. Cela nous paraît déplacé de visiter ce lieu avec nos enfants comme on visiterait un musée: trois petits tours et puis s'en vont. Pour y aller, la coutume est d'acheter des objets -y compris de la dynamite- pour les offrir aux mineurs. Pourtant, ce n'est pas de charité dont ces hommes ont besoin. On ne peut pas entrer et visiter ce lieu sans prendre en compte la souffrance humaine intimement liée à cette montagne. Où est le respect dû aux nombreuses victimes et aux mineurs d'aujourd'hui en visitant cette mine de façon aussi distanciée? Comment passer à côté de leurs souffrances puis s'en aller comme si nous n'avions vu qu'un tableau? Nous ne sommes pas sûrs de nous mais nous n'avons pas envie d'y emmener nos enfants.
Nous trouvons de nouveau un hôtel au centre ville. Ce lieu n'est pas très convivial. De plus, Leia est malade. Nous n'avons jamais été aussi patraques que ces derniers jours: après Yan, Leia. Nous ne sommes pas en forme. Fatigue du voyage ou simple concours de circonstances? On se traîne. J'emmène Lise pour visiter le musée de la monnaie. Cet édifice est un lieu important de l'Histoire de cette ville: la monnaie était frappée ici à l'apogée de l'exploitation de la mine. Néanmoins, nous n'arrivons pas à la bonne heure et on ne peut pas la visiter. Nous sommes déçues. Nous nous promenons en ville à tour de rôle pour nous occuper de Leia allongée dans la voiture. Comme d'habitude quand le moral n'est pas au top: on décide de tailler la route.
Nous nous ravitaillons pour la longue piste qui nous attend: 1000 km en partant de Uyuni pour arriver à Tupiza en passant par le Salar et les différentes lagunes: « Laguna colorada » et « Laguna verde ». Le tout en approximativement une semaine car la piste est mauvaise. Nous avons hâte de regagner de nouveaux horizons plus sauvages et de retrouver Luc et Erica à Uyuni.
Mai 2010 : Cochabamba, Sucre, Potosi |
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